nov. 21, 2024

Un suisse itinérant : De l'enfance au Tessin aux voyages à travers 100 pays

Marco Pedrazzini, financier suisse.

Après une licence en économie à l'Université de Berne, Marco a travaillé dans des société internationales, en charge du développement des affaires dans différentes zones géographiques. Ensuite, en tant qu'indépendant, il a été associé à des société de conseil (management consulting) pour la définition et la mise en place de stratégies d'entreprise. Après sa retraite il retient des mandats d'administrateur et poursuit ses intérêts dans l'art contemporain.

Arrivé à Genève à 25 ans après une enfance dans le Tessin, cet économiste de formation a trouvé dans la cité internationale un cadre à la fois stable et cosmopolite, où il s’est installé dans les années 1970. Issu d’une famille où le patriotisme s’exprime dans l’action – son père, officier suisse, a notamment servi comme attaché militaire en Italie –, il cultive une vision ouverte de la Suisse. Grand voyageur, il a parcouru près de 100 pays, tout en restant attaché aux valeurs helvétiques d'équilibre et de consensus, qu’il voit comme les piliers de la stabilité du pays.

Rêves et Réalités : De la Passion du Cinéma à une Carrière Économique

Moi, je suis arrivé à Genève à l’âge de 25 ans. Je suis né dans la Suisse italienne, près de Lugano. J'ai fait mes écoles là-bas, donc ma langue maternelle est l'italien. Ensuite, j'ai fait mon université à Berne, où j'ai étudié l'économie. Après l'université, je suis venu à Genève, et j'y suis encore. J'ai découvert Genève au début des années 70, et c'est une ville que j'ai aimée. Je suis venu à Genève parce que je la connaissais déjà et j'aimais bien son caractère international et cosmopolite. Je me suis donc établi ici, et voilà, j'y suis encore. À l'époque, Genève était très différente d'aujourd'hui. C'est amusant, car lorsque je regarde des photos de cette époque, ce sont encore des photos en noir et blanc. Évidemment, on voit que les gens étaient habillés différemment, la mode a changé, etc., mais pour mon contact avec la ville et ma façon de vivre ici, pas grand-chose n'a changé.

Et la ville où je suis né s'appelle Bellinzona, une petite ville à côté de Locarno. Lorsqu'on regarde avec des yeux d'enfant, tous les endroits se ressemblent, mais il y avait une bonne qualité de vie. À l'école, on s'amusait bien, et il y avait à l'époque un avantage au Tessin : il y faisait davantage de soleil que dans les autres parties de la Suisse, donc le Tessin était considéré comme plus ensoleillé qu'ailleurs. C'est dans cet environnement que j'ai grandi, avec des parents très proches de leurs enfants, et j'ai vécu une enfance heureuse ; c'est pourquoi je n'ai pas de mauvais souvenirs. Locarno aussi a changé, mais d'un point de vue architectural, le cœur de la ville a été préservé. Locarno est une petite ville de 10-15 000 habitants où tout le monde se connaît et où il y a des familles connues, qui s'occupent un peu de la politique là-bas, et ma famille en faisait partie. Genève, par contre, est une grande ville où l'on est anonyme, où l'on n'a pas le sentiment que tout le monde regarde ce que l'on fait.

Un père militaire, entre la Suisse et l’Italie : souvenirs d'une carrière internationale

Pendant très longtemps, il y avait des vols Genève-Lugano trois fois par jour. Cela durait une demi-heure et on y était, mais maintenant, c'est cinq heures de route ou cinq heures de train, ce qui devient un long voyage. Avant, on pouvait envisager — et cela m'arrivait souvent — de faire l'aller-retour dans la journée, en ayant toute la journée sur place. Maintenant, ce n'est plus possible, car ils ont suspendu la liaison aérienne avec le Tessin.

Mon père était un des hauts gradés de l'armée suisse et a fait une carrière militaire qui a commencé pendant la guerre. Dans les années 40, la Suisse n'a pas connu de guerre, mais tous les militaires étaient mobilisés à la frontière. Mon père était déjà officier à l'époque, et il a passé une bonne partie de la guerre à la frontière pour défendre la Suisse, et cela a bien fonctionné. Ensuite, il a poursuivi sa carrière militaire et a été envoyé dans des académies militaires, notamment près de Rome, où j'ai passé une année lorsque j'avais 10-12 ans. Puis, il est devenu attaché militaire de la Suisse à l'ambassade en Italie, ainsi qu'à l'ambassade grecque - c'est l'ambassade suisse à Athènes. Il était toujours rattaché à l'armée, mais son rôle était de faire la liaison avec l'armée italienne, avec laquelle la Suisse a toujours entretenu de bons rapports. Il y avait un attaché militaire italien à Berne et un attaché militaire suisse à Rome, ainsi que dans d'autres capitales, donc il faisait partie du cadre de l'ambassade. Mon père a beaucoup aimé son métier, et ma mère aussi a bien apprécié cette période en Italie. Par la suite, mon père est rentré et a pris sa retraite.

La Suisse, modèle de stabilité et de consensus

Peut-être ai-je un petit regret. À un certain moment, lorsque j'étais jeune, je me suis intéressé au cinéma, et j'aurais éventuellement aimé en faire mon métier, mais cela ne s'est pas réalisé, donc cela reste un souhait inexaucé. Néanmoins, j'ai fait une petite carrière dans la vie économique à Genève. J'ai également beaucoup voyagé pour les sociétés dans lesquelles j'étais actif, ainsi qu'avec mon épouse, ce qui m'a permis de découvrir de nombreux pays et d'avoir une vie professionnelle intéressante.

Nous avons la chance d'être nés en Suisse, une chance que j'apprécie chaque jour. Nous avons un gouvernement qui n'a pas changé depuis 50 ans et une bonne cohésion sociale. Il n'y a pas de conflits, ou presque. Je suis patriote dans le sens où je suis heureux d'être Suisse. Cependant, j'ai toujours eu du plaisir à découvrir d'autres pays, et j'ai eu la chance de pouvoir beaucoup voyager, ayant visité presque 100 pays. Cela m'a donné une ouverture d'esprit cosmopolite, qui me permet d'apprécier ce qui va bien dans chaque pays. Je ne suis pas critique ; j'essaie de toujours voir le positif.

La Suisse a un tourisme historique qui existe depuis un siècle. Les premiers touristes venaient en Suisse, ce qui a permis au pays de développer une tradition d'accueil et de répondre aux besoins du tourisme, notamment dans l'hôtellerie, où des générations d'hôteliers se succèdent et maintiennent un style familial dans les hôtels.

La force de la Suisse, c'est le consensus : nous avons trois langues officielles, voire quatre, et des religions différentes, et personne ne dérange l'autre à cause de cela. La Suisse a su maintenir un équilibre. En Suisse, en politique, l'égo est effacé ; les gens qui s'engagent en politique sont bien sûr fiers de ce qu'ils accomplissent, ils sont motivés, mais il n'y a pas de star system comme dans d'autres pays, et j'apprécie cela énormément. En Suisse, on ne connaît même pas le nom du président de la Confédération ; il change chaque année, et neuf personnes sur dix ne savent pas qui c'est, et c'est très bien comme cela. Le consensus suisse est ce qui a permis à la Suisse de prospérer : elle évolue dans un système harmonieux qui a su surmonter de nombreuses crises. La Suisse a ainsi acquis une solidité que d'autres pays n'ont pas eue, grâce, je pense, à cette volonté d'être unis.

Pour réussir, il faut travailler, avoir une bonne analyse de la situation et persévérer jusqu'au bout du projet sans se laisser décourager par les obstacles qui peuvent survenir en cours de route. Mais le timing est très important, et ce n'est pas toujours vous qui le déterminez. Quant à la chance, soit on l'a, soit on ne l'a pas.

Zhenishbek Edigeev

Président de l'Association "Alpalatoo"

Le siège principal de l'Association "Alpalatoo" est situé dans la ville de Genève, avec une succursale dans la capitale du Kirghizistan, à Bichkek.

Adresse : Ville de Genève, 24 rue Chemin de Beau-Soleil 1206